Âmes sensibles, ne pas lire. J’ai écrit tout ceci dans la chambre après la bataille. Le plus important c’est que malgré tout, ce jour est de loin, le plus beau jour de ma vie.
Bonjour,
Lundi 22 avril, minuit et des bananes. Quelques contractions, puis quelques douleurs dans les reins. Elles reviennent souvent. Je me dis « tiens, c’est peut-être le début du travail ».
Portable à la main, je les chronomètre. Pas très régulières ces douleurs, je continue de chronométrer. Elles deviennent plus intenses, mais largement supportables. Je fais mes exercices de respirations et ça passe. Je me rends compte que j’ai eu plus mal il y a trois ans avec une pyélonéphrite. Deux spasfons, mais ça ne les calme pas. Je me dis « chouette, enfin ! ».
On arrive vite à toutes les 4-5 minutes. Il est 4h du matin. Je mets les dernières choses dans ma valise, comme ma BB crème (oui TRES utile !).
Douche, bol de céréales et je vais réveiller le papa. Il est 5h (Il n’est pas en forme et s’est tapé une gastro carabinée la veille). Je bois un café avec lui et on part tranquillement.
On arrive aux urgences et on tombe sur la sage-femme qui m’avait fait le décollement de membranes. Là, je n’espère qu’une chose, que ça ne soit pas encore un faux travail et je me dis qu’au pire, on aura pas besoin d’y aller à 9H. Elle est surprise de nous voir, m’ausculte et me sort » on va passer en salle « . En salle ? » Oui en salle de naissance, vous êtes ouverte à 3 ! ».
La joie, ouverte à 3, ça veut dire péridurale directe ! Elle m’installe la perf, nous donne des tenues magnifiques (chaussons, bonnets, blouses, etc) et on nous accompagne, salle de naissance n°6.
6h45. On m’installe pour la péridurale, l’anesthésiste n’a pas l’air sympa mais bon, je m’en fous, je veux juste la piqûre magique, même si je gère très bien les contractions, je n’ai pas forcément envie d’avoir mal. Il me pique, je ne sens pas l’aiguille mais le ¤¤¤, il me fait très mal avec le cathéter. L’horreur, il me trifouille dans la colonne, ça fait très mal. Il me dit qu’il doit recommencer, donc deuxième piqûre, et hop, cathéter, il fait mal mais moins que la première fois. C’est installé, il m’explique le système de pompe (on dose soi-même) et s’en va.
On me mets le tensiomètre, le monitoring et on m’ausculte. La sage-femme avec pour prénom « Léocadie » n’arrive pas à percevoir le cœur du bébé, donc elle me perce la poche des eaux et va installer avec un tube, une sonde sur la tête de Lapin, fait des prises de sang sur son crane pour vérifier l’oxygène mais n’y arrive pas. Une seconde sage-femme prend le relai et plus douée, fait toute la manip en deux secondes. Verdict: Tout va bien.
Il est 8h, changement d’équipe, chouette. Une sage-femme se présente et sera chargée de mon accouchement. J’ai complètement oublié son prénom, je me rappelle d’une blonde très sympa. Elle nous propose de mettre de la musique. Le papa regarde les compiles et on rigole car elle doit dater de 1994 avec le Mégamix de Corona. Mais le CD ne passe pas, trop rayé, on a donc de la musique classique.
Il fait très chaud et je gère la péri en appuyant seulement quand la douleur est très forte. J’ai les jambes engourdies et j’ai très soif.
8h30 – Ouverture à 5,5
9h45 – Ouverture à 7
11h30 – Ouverture complète.
Je demande à la sage-femme de ne pas m’informer si elle me fait une épisio avant la fin de l’accouchement pour ne pas me stresser. Elle me fait pousser. Je ne sens plus mes jambes et ça fait deux heures que du liquide coule (la poche a mal été percée par Léocadie), j’ai peur de me faire dessus mais la sage-femme me rassure.
Elle sent sa tête et me dit qu’elle fera moins de 4kg. Je pousse encore, rien ne se passe. La sage-femme me dit qu’on va attendre jusque 12h30 que Maurice descende tout seul.
Un autre anesthésiste arrive et remet une seconde dose de produit dans la machine, sur conseils de la sage-femme.
Ça pousse dans mes fesses, je me dis que bientôt, j’aurais mon bébé dans les bras, j’ai hâte. Elle revient à 12h30 et me dit que rien n’a bougé, qu’il va falloir surement l’aider avec les ventouses. Elle me fait appuyer plusieurs fois de suite sur la péri et au bout d’un moment, c’est elle et le papa qui appuient dessus.
13h… Je vois débarquer une dizaine de personnes. J’ai très chaud, je retire mes lunettes. Là, l’interne qui m’a fait l’écho du samedi apparaît, c’est elle qui va m’accoucher, ainsi que le docteur I. qui avait l’écho du 5eme mois et nous avait annoncé que Lapin était une fille.
Là, ils surélèvent la table, avancent les lumières vers mon entre-jambe, mettent mes jambes dans les étriers (d’ailleurs une des personnes ne l’avait pas bien installée et ma jambe gauche est tombée avec l’étrier au premier mouvement). La sage-femme appuie encore sur ma péri, les médecins sortent des grands trucs en métal et là, je comprends : Les Forceps. Même myope, je les vois très bien. Une machine de guerre. On les place dans mon intérieur, tourne des vis etc. Puis, on me dit qu’il faut aller très vite.
L’angoisse m’envahit. On me fait pousser et l’interne tire en même temps. L’horreur, ça fait mal aux os. Je pousse encore et encore mais rien. Là, je panique. Elles se mettent à deux pour tirer, j’ai très mal, je hurle et je pousse. Et je me fais limite engueuler car « on ne doit pas m’entendre ». Là, je pleure et je pousse, j’ai très chaud. Tout le monde me parle en même temps, je ne comprends plus rien. On me sort « restez avec nous » et je rétorque « je vais pas aller faire un tennis ! ».
Puis, je repousse, l’interne me dit de ne l’écouter que elle. Sauf qu’un coup elle dit « poussez, euh non inspirez » et « inspirez, non poussez ». Je ne contrôle plus mon corps, mes jambes ne tiennent plus et on me demande de laisser mes fesses à plat sur le lit, sauf que quand elles tirent, mon corps se soulève et je n’arrive pas à le maintenir. Je demande aux sages-femmes de maintenir les jambes, je me retourne vers le papa, les larmes plein le visage et je pousse. Puis, on me fait bloquer, je respire, puis on me fait pousser, bon là, je sens plus rien, et on me dit « venez la chercher » et là, je la vois.
J’ai peur de la faire tomber, j’ai l’impression qu’elle glisse et la sage-femme m’aide à la mettre sur moi. Elle est là. Les yeux ouverts, pleure à peine. J’en pleure de joie et j’oublie tout le reste.
On me la prend, la puéricultrice crie « 4,7 kg ! », j’envoie le papa avec ma fille pour les premiers soins. L’interne me recoud et je lui demande si ils vont enlever le placenta et elle me sort en rigolant « tout est fait, on a même fait le prélèvement du sang de cordon ! ». J’ai une déchirure, 4 points, rien de bien grave comparé à la violence de l’accouchement.
On me ramène mon bébé, elle est née à 13h25 et pèse 4,520 kg pour 55 cm. Elle est magnifique et plus rien d’autre ne compte.
Aujourd’hui, je ne suis pas capable d’estimer le douleur, je ne m’en rappelle plus, je ne garde que le souvenir de la peur que j’ai eu, qu’on lui arrache la tête et qu’on m’arrache le corps comme dans les films d’horreur. Je ne me rappelle pas du visage des médecins présents, ni du reste. Le papa lui, est plus marqué et plus sous le choc de cette naissance et c’est lui qui me rappelle comment ça s’est passé. En tout cas, je n’en suis pas traumatisée et je me dis que sans la péri, ça ne l’aurait pas fait ! L’accouchement a été très rapide pour un premier.
Après deux heures de peau à peau avec mon bébé, on nous monte chambre 215. Je ne pense qu’à une chose : Boire.
L’interne est venue me voir trois jours plus tard, j’ai beaucoup parlé avec elle et elle me dit que je poussais bien mais que la petite n’aurait pas pu sortir seule et que c’était un accouchement difficile malgré tout. Ça m’a fait du bien ce petit débriefing, je culpabilisais de ne pas avoir pu faire mieux.
J’espère que vous gardez un merveilleux souvenir de votre (ou de vos) accouchement(s) et que, dans le cas contraire, vous êtes bien entourée.
A très vite, pour la suite de mes aventures!
E.